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Dénommé le caïman, Issa Pouye, naguère lutteur hors pair, traverse en cette période des moments très difficiles. En plus d’une série de défaites cumulées, il a connu une année blanche, cette saison. Dans cet entretien accordé au journal « Le Pays », le pensionnaire de l’écurie Thiaroye sur Mer aborde avec nous ses années passées dans le noir, ses relations avec les autres lutteurs de Thiaroye, non sans oublier le mystique, qui occupe une place primordiale dans la lutte sénégalaise.
Comment se passent vos entrainements présentement ?
Je me sens bien dans ma peau. Je suis en pleine forme, comme vous pouvez le constater. Je suis mes entrainements normalement et je travaille dur avec l’écurie. Dieu merci, les lutteurs de l’écurie sont présents aux séances d’entrainement et on essaie de faire le maximum pour être dans les bonnes dispositions en vue de la saison prochaine. Il y a souvent de petits problèmes au sein de l’écurie, c’est tout à fait normal. C’est un constat général : toutes les écuries font face à ces désagréments, mais il faut faire avec. On essaie d’en parler avec tous les acteurs concernés et on passe à autre chose. Actuellement, les choses sont à la normale, on travaille bien et il n’y a aucun souci sur ce point-là. Le président Ibou Niane ainsi que père Khoulé répondent aux moindres sollicitations des lutteurs. Ils ne ménagent aucun effort pour booster l’écurie au sommet.
Pourquoi avez-vous opté pour une année blanche, cette saison ?
La saison de lutte 2012, très riche en combats et très disputée, s’est achevée sans que l’on ait vu Issa Pouye dans l’arène. Mais c’était une décision personnelle de prendre du recul par rapport à tout ce que j’ai vécu, les saisons précédentes. En quelque sorte, j’ai pris du recul pour mieux sauter. J’ai traversé des moments très difficiles, mais je rends grâce à Dieu : nous nous sommes bien préparés sur tous les plans et Issa Pouye compte revenir en force la saison prochaine.
Avant de choisir de faire une année blanche, vous aviez cumulé une série de défaite. Comment expliquez-vous cela ?
Comme je le dis souvent, lors de mes sorties, la défaite fait partie du jeu. En lutte, tu peux connaitre des passages à vide, cela fait partie de la carrière d’un lutteur. Aujourd’hui, on gagne ; demain on perd. C’est la loi du sport.
Que répondez-vous à ceux qui disent que vous avez peur d’encaisser des coups ?
Je ne suis pas là pour me juger moi-même. Mais je ne vais jamais fuir lors d’un combat à cause de coups. Je n’ai peur de personne dans l’arène. Si tel était le cas, je n’entrerais pas dans la discipline. Quand je gagnais mes combats, les gens avaient une autre opinion de moi. Maintenant que je suis dans l’impasse, on me traite de tous les noms. Mais le milieu est ainsi fait. Les spéculations et la lutte vont de paire. J’ai fait du chemin dans cette discipline. J’ai rampé pour arriver à ce niveau. Aujourd’hui, la lutte pure et dure est délaissée au profit du mystique. Certains lutteurs sont très confiants, car blindés mystiquement. Maintenant, ce sont les marabouts qui luttent. Les lutteurs ne sont que des figurants dans l’enceinte. Si ce n’était pas le mystique, beaucoup de lutteurs ne seraient pas là où ils sont aujourd’hui. Ils ne sont pas courageux et ne savent pas lutter. Les lutteurs vont partout pour trouver un marabout. Il y en a même certains qui vont jusqu’en Inde. Ils ne croient pas en eux. Un jour, un marabout m’a dit : « Si tu veux Issa, je peux te donner un talisman pour lequel quiconque te terrasse meurt aussitôt après ». Mais je ne suis pas du genre à faire ces requêtes. J’avais refusé, car obtenir la victoire n’en valait pas la peine. Je suis un musulman et je ne ferai jamais des choses maudites par l’islam pour acquérir une victoire. Beaucoup de lutteurs seront brûlés vifs par Dieu, à cause des voies et moyens qu’ils utilisent pour remporter un combat. En tant que croyant, je ne peux pas me permettre certaines pratiques rien que pour la gagne. Je ne conçois pas ces genres de choses. J’ai déjà été, à maintes reprises, touché mystiquement dans l’arène. Mais je ne vais pas m’étaler sur le débat. Mes parents prient sans cesse pour moi, mes amis aussi, sans compter les gens qui m’adorent.
Tout le monde dit que vous ne savez pas bagarrer. Durant la pause que vous avez observée, avez-vous pris le temps d’apprendre la bagarre ?
Je ne privilégie pas la bagarre lors de mes combats, mais cela ne veut pas dire que je ne sais pas donner des coups. Il est difficile pour un lutteur de m’atteindre sur un coup direct. Je suis bien sur mes gardes lors de mes combats. Les gens interprètent mal tout ce que je fais. Mais qui connait bien Issa Pouye sait que je suis quelqu’un qui cherche toujours les corps-à-corps. Je privilégie la lutte pure et dure. Les coups, c’est juste pour chercher la faille. Regardez ce qui s’est passé lors du combat Tapha Tine vs Bombardier : combien de coups ont été donnés ? Les amateurs étaient restés muets face à cette violence. Ils souhaitaient voir de la lutte. Mais techniquement, les deux lutteurs ont manqué de bagages pour qu’il puisse y avoir une chute. Je déplore ces genres d’attitudes dans l’arène ; ce n’est plus de la lutte, mais de la boxe. Les lutteurs doivent être conscients de cet aspect-là, les amateurs attendent surtout de nous de vrais combats de lutte, faits de prises et de technique. La frappe, c’est juste pour avoir l’ouverture. Je ne suis pas de nature violente ni méchante d’ailleurs, mais comme les gens disent du n’importe quoi sur moi, cela ne fait que me motiver davantage. Je n’ai encore rien perdu dans l’arène et l’avenir nous le prouvera. Balla Gaye 2, je l’ai freiné en premier. Tapha Tine, je lui ai infligé le revers le plus humiliant de sa vie, sans oublier les Ouza Sow et autres. Les lutteurs de ma génération ne sont pas plus forts que moi, physiquement. Je sais mieux lutter qu’eux. Ils peuvent dès à présent m’inclure parmi les adversaires potentiels de la saison prochaine, ceux qui m’ont terrassé comme ceux à qui je dois accorder la revanche.
Pourquoi n’êtes vous pas venu faire des prestations au stade, afin de communier avec vos supporters ?
J’étais bien tranquille dans mon coin, j’avais besoin de prendre du recul. J’ai eu une carrière assez compliquée. Le fait d’avoir pris cet écart me permet d’avoir les idées claires sur mon plan de carrière. J’adore le « Bakk », j’adore tout ce qui touche à la lutte. J’ai la lutte dans les veines. Toute cette ambiance me manque. Mais je ne pouvais pas me permettre de venir au stade avec toutes les épreuves que j’ai traversées. Pour moi, quand tu gagnes, tu es plus motivé à faire du « Bakk ». Personnellement, je ne peux pas concéder une défaite et venir après au stade faire comme si de rien n’était.
Que réservez-vous aux amateurs de lutte pour la saison prochaine ?
Je suis de tout cœur avec mes supporters. Ils sont très impliqués lors de mes combats : je les en remercie. Je n’ai pas besoin de supporters « pigeons-voyageurs ». Je suis avec ceux qui sont avec moi pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur reste à venir malgré toutes les difficultés que j’ai eu à surmonter. Je ne blâme personne concernant mes performances, je remets tout entre les mains du Bon Dieu. Incha Allah, Issa va revenir en force. Je n’essaie pas, par contre, de porter atteinte aux lutteurs de l’arène, bien que j’aie été victime, à plusieurs reprises, d’attaques mystiques. Je ne peux pas tout dire, mais ils se savent. Je ne négligerai aucun détail. Avec l’expérience, on apprend petit à petit. J’irai chercher la victoire partout où il sera nécessaire d’aller.
Est-ce que les promoteurs démarchent vos combats ?
Oui. Les promoteurs démarchent mes combats et ils sont en train de discuter avec le staff.
Quels sont les lutteurs que vous ciblez ?
Je ne fais pas fixation sur tel ou tel autre lutteur. Je n’écarte aucune possibilité dans l’arène. Je suis prêt à en découdre avec tous les lutteurs de ma génération. L’arène est assez ouverte, les lutteurs se valent. Excepté August Mbagnick Séne, je suis prêt à en découdre avec n’importe quel lutteur. Ce ne sont pas des adversaires qui me feront défaut. Je n’ai envie que d’une seule chose : lutter. J’ai la nostalgie de l’arène. Mon souhait, cette saison, est de lutter au minimum deux fois. Je m’entraine pour ça et j’ai hâte de voir la saison.
Êtes-vous conscient que vous avez accusé du retard, comparé aux lutteurs de votre génération ?
Mon retard peut s’expliquer en des termes simples. On peut l’interpréter comme une course : si tu accuses un petit retard, tu risques d’être laissé en rade. Le milieu de la lutte est ainsi fait, il y a des hauts et des bas. Un lutteur peut régner pendant longtemps, mais en un moment donné, il laisse la place aux autres. Personne n’aime être au second rang, mais il faut accepter les règles du jeu. Seul le pouvoir de Dieu est éternel. Le sport a ses réalités.
Il y a plusieurs écuries à Thiaroye, aujourd’hui. Pourquoi ne pouvez-vous pas faire la fusion ?
C’est vrai qu’il y a différentes écuries à Thiaroye, on ne peut pas le nier. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes en conflit. Il n’existe aucun problème entre les lutteurs de Thiaroye. Il est normal qu’une zone aussi grande regroupe des écuries diverses. La différence ne constitue nullement des barrages entre nous. Je fais tout pour avoir de très bonnes relations avec tous les lutteurs de Thiaroye. Je me bats pour cet équilibre, on est tous des frères même si certains ont préféré créer leur propre écurie, à l’image de Baye Mandione. Cependant, la concurrence est saine, il n’y a aucun problème entre nous. Il y a de jeunes lutteurs très prometteurs dans notre écurie tels que Ndiaga Ndoye, Fallou et d’autres jeunes encore. Ils se sentent bien ici et on travaille dur, car on vise le sommet de l’arène.
Les promoteurs ont décidé de fixer la barre des cachets des lutteurs à 75 millions de francs Cfa. Quel commentaire en faites-vous ?
Personnellement, je pense, et j’en suis convaincu, que les lutteurs méritent amplement leurs cachets. Le sport, en général, a évolué partout dans le monde. Les footballeurs perçoivent des milliards de francs. Pourquoi pas les lutteurs? Les promoteurs doivent revoir leurs propos à l’encontre des lutteurs. Ils doivent évoluer suivant l’audience qu’a la lutte aujourd’hui. Les intérêts sont communs. Il ne faudrait pas que ce point devienne une source de divergences. C’est par la grâce de Dieu, si la lutte est arrivée à ce stade. Si aujourd’hui des lutteurs gagnent des millions, c’est leur chance, la vie est ainsi faite. Il ne faut pas qu’on les en prive. C’est leur réussite, chacun a sa chance dans la vie et c’est pareil pour tous les sportifs. Il ne faut pas être méchant. Si certaines personnes sont connues ou jouissent d’une certaine notoriété, c’est grâce à la lutte. Donc, il faut défendre les intérêts de manière équitable. Chacun y trouve son compte. Je crois que ce n’est pas la peine de faire toute une histoire à ce sujet. Je suis sûr que les principaux concernés vont revoir leur position parce que la lutte constitue un facteur essentiel de développement dans le sport au Sénégal. Mieux, le débat peut ne pas être long. Que les promoteurs qui sont en mesure de payer de bons cachets organisent les combats et que ceux qui n’en sont plus capables se retirent. C’est simple.
Quelle est votre appréciation par rapport à la sanction infligée à Boy Niang par le Cng ?
La lutte a ses réalités. La violence ne date pas d’aujourd’hui dans l’arène. Il faut juste dire que les gens l’ont davantage médiatisée. J’ai déjà eu à subir ces désagréments. C’était lors d’un combat face à Zoss. Celui-ci avait cassé le pare-brise de ma voiture, mais je n’ai pas trouvé nécessaire d’en faire tout un problème. J’ai juste trouvé que les nerfs étaient très tendus lors des périodes d’avant et après combat. Il est normal que les gens se lâchent et se défoulent. Je mets ça sur le compte des aléas de la lutte, rien de plus. Ceci étant dit, je trouve 5 ans de suspension trop lourde. C’est une décision qu’on doit revoir dans l’immédiat. J’aurais trouvé raisonnable qu’on réduise la sanction à 1 an.
Quel est votre plus beau souvenir ?
J’ai aimé mon combat contre Tapha Tine plus que les autres : c’était un challenge pour moi de gagner ce combat. Je n’avais pas la faveur des pronostics. D’ailleurs, un vieux que j’avais croisé avant la tenue du combat m’avait suggéré de laisser tomber. Pour lui, c’était risqué de ma part d’affronter un tel adversaire. Mais à sa grande surprise, j’ai battu le géant du Baol d’une superbe prise. Vous ne verrez pas de sitôt une pareille prise dans l’arène, je vous le garantis.
Qu’est-ce que vous détestez dans la vie ?
Je n’aime pas la méchanceté. D’ailleurs, je mets toutes les difficultés que j’ai eu à traverser dans ma carrière sur le compte de la volonté divine. Je suis quelqu’un de très sympa et facile à vivre. Ceux qui me connaissent ne vous diront pas le contraire.
Quel est votre plat préféré ?
En général, je n’ai pas de problème concernant le manger. Je mange du tout. Mais j’aime bien le riz à base de poisson surtout le « warragne ». J’adore ce poisson et comment on le cuit. Bref, les plats à base de poissons sont mes préférés.
Aliou DIOUF &Youssouf Boune Hatab Sané (Stagiaire)
Le Pays au Quotidien
17 Commentaires
Boomm
En Août, 2012 (19:56 PM)Binda
En Août, 2012 (19:57 PM)Boy Dakar
En Août, 2012 (19:58 PM)no rage nakk ,
Paix
En Juillet, 2023 (22:43 PM)Féél
En Août, 2012 (20:00 PM)Boommm
En Août, 2012 (20:06 PM)Jokko
En Août, 2012 (20:07 PM)Liguèye rék , diamou yalla ak sante sounou borom si loumou doogal
Liguèye rék , diamou yalla ak sante sounou borom si loumou doogal
Sapotighetti
En Août, 2012 (20:08 PM)As
En Août, 2012 (20:09 PM)Thio
En Août, 2012 (20:24 PM)Ne La Thiass
En Août, 2012 (21:02 PM)Ket
En Août, 2012 (22:48 PM)Gute
En Août, 2012 (22:52 PM)Honey Sugar
En Août, 2012 (23:07 PM)Boy Thia
En Août, 2012 (23:32 PM)WAY
Mdd
En Août, 2012 (09:42 AM)Toubabboubone
En Août, 2012 (11:55 AM)vendus de votre race pays de guéwels vous etes soit disant civilisé vous copiez le vice de l'occident et sacrifiez vos vraies valeures vous pensez qu'a marabouter les gens pour prendre leur bien
YALLA KEN LA dieuridieuf sérigne touba
Baye Sanou
En Septembre, 2012 (15:27 PM)Participer à la Discussion