La future Université privée catholique, qui sera construite sur une aire de 80 ha, alimente déjà des polémiques avant même sa sortie de terre. Les jeunes de Coubalan où sera édifiée ladite infrastructure crient au «scandale» et, parlent d’acquisition «obscurantiste et abusive de leurs biens» alors que l’Evêque de Ziguinchor balaie, en bloc, ces accusations et nie toute obtention frauduleuse de ces terres.
Le bras de fer entre l’Eglise catholique de Ziguinchor et les jeunes de Coubalan, concernant le projet de construction de l’Université privée catholique sur une surface de 80 ha, risque d’atteindre son faîte, le 14 juin. Car, si la «bombe foncière» n’est pas désamorcée à la date indiquée, le pire est à craindre, le jour de la pose de la première pierre de l’Université privée catholique, qui sera effectuée sous la présidence du chef de l’Etat. Les jeunes de ce village, regroupés dans le Comité de rénovation de Coubalan (Corecou), village situé dans le département de Bignona et dans l’arrondissement de Tenghori, qui se disent très décidés à ne pas céder leur «terre qui constitue un symbole et une fierté pour toute la population diola» avertissent : «Ils passeront sur nos cadavres pour poser la première pierre», avertit Kader Sagna, responsable de la section du Corecou de Dakar.
En effet, ces jeunes puisent leur courroux dans l’attribution des 80 ha à l’Eglise catholique de Ziguinchor, où sera édifiée la future Faculté de gestion de cette Université d’un coût de 25 milliards de francs Cfa. Une acquisition qu’ils qualifient «d’expropriation de biens d’autrui, car il était seulement prévu pour la construction de cette Faculté de gestion 20 ha que nous avons gracieusement offerts à l’Eglise. Et, cette décision a été entérinée au cours d’un congrès du village et jugée suffisante par l’architecte-conseiller Pierre Goudiaby Atépa», précise notre interlocuteur.
Mais, poursuit Boubacar Sagna, un autre responsable du comité, les autorités de l’église ont fait fi de cette décision «collective et souveraine du village» pour approcher en catimini des vieillards analphabètes pour «récupérer davantage de terres et sacrifier, du même coup, plusieurs générations de jeunes qui aimeront savoir, un jour, où étions-nous quand l’acte s’effectuait.» Des aveux formulés par les «sages de Coubalan», lors de leur congrès extraordinaire du 29 septembre 2001. «Les autorités de l’église sont venues pour faire signer aux vieux des documents de cession de leurs terres pour un projet dont ils ne maîtrisent même pas les contours et les intérêts. Ils ont tous reconnu qu’ils l’ont fait sans leur consentement et d’autres ont avoué avoir signé sans savoir réellement de quoi il s’agissait. Donc, nous refusons d’accepter de céder nos terres, même après la délibération de la Communauté rurale», râle M. Sagna.
Et, d’ailleurs, après une rencontre avec l’Evêque de Ziguinchor qui se serait terminée en «queue-de-poisson», le Corecou «pour se retrouver dans ses droits» a rédigé plusieurs correspondances, après celle adressée au chef de l’Etat le 12 août 2002, à l’Evêché de Ziguinchor, qui pilote ce projet, dont la dernière date du 30 avril 2006 signée du Président Bacary Badiane Babaye avec des ampliations adressées entre autres, au président de la République, à l’Assemblée nationale à la Conférence épiscopale et aussi à l’Abbé Diamacoune Senghor. «Mais, il n’ y a eu aucune suite. Personne ne réagit parce que l’Eglise préfère faire dans le dilatoire. Car, elle pense tenir le bon bout», fulmine le très remonté M. Sagna.
Du côté de l’église, par contre, on joue à l’apaisement et à la modération dans cette affaire. Monseigneur Maixent Coly, évêque de Ziguinchor, qui reconnaît ce quiproquo foncier et les protestations de certains jeunes «qui s’estiment lésés dans ce projet», balaie, tout de même, d’un revers de la main l’acquisition frauduleuse de «ces terres inexploitées et qui servaient à la culture de l’arachide, il y a quelques années». «Je suis désolé. J’ai reçu les 80 ha avec le consentement du village et après la délibération du Conseil rural. Et, les populations m’ont dit que ce projet va constituer une aubaine pour leurs enfants et qu’elles se reconnaissaient, complètement, dans cette œuvre. D’ailleurs, on ne peut pas acquérir comme ça des terres parce que nous sommes dans un pays régi par une législation», souligne-t-il. L’évêque, très peiné par les allures qu’est en train de prendre ce projet, lâche quelques regrets. «Je voulais, tout seulement, une œuvre qui rassemble et non (une) qui cause autant de protestations. Mais, nous sommes prêts à réduire les 80 ha pour calmer les ardeurs des jeunes», propose-t-il.
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