L’étendue du problème des médicaments contrefaits au Sénégal est alarmante, selon une étude de l’Agence de développement des Etats-Unis (Usaid), qui estime que le marché noir sénégalais des médicaments se chiffre entre 5,7 milliards et 7,8 milliards de francs Cfa par an.
Le chargé d’affaires de l’Ambassade des Etats-Unis à Dakar, Robert Jackson, a donné ces statistiques au cours de l’ouverture, mercredi à Dakar, de la Conférence régionale sur la contrefaçon des médicaments.
L’étude estime à 26 % le nombre de patients qui se tournent vers le marché illégal pour leurs besoins pharmaceutiques.
La raison avancée par les patients au cours de l’enquête est surtout liée au fait que les médicaments en question sont moins chers que ceux des officines.
Pourtant les pauvres, notamment les personnes âgées, sont plus exposés au danger des médicaments contrefaits. Car, leurs systèmes immunitaires sont vulnérables en raison de leur alimentation déficiente et de leurs conditions de vie difficiles, fait remarquer l’étude. Pour le chargé d’Affaires, «beaucoup de gens ne sont pas conscients des dangers de ces médicaments qu’ils achètent sur les mêmes marchés où ils achètent des fruits et légumes, simplement parce que c’est plus facile et moins cher».
Le commerce de médicaments contrefaits «reste, selon lui, l’une des menaces les plus sérieuses pour les populations d’Afrique de l’Ouest».
Au Sénégal, «les scientifiques se demandent si le paludisme n’est pas en progression, parce que les gens ont développé une résistance aux traitements prescrits en raison de l’utilisation de médicaments contrefaits», a ajouté Robert Jackson.
Interrogé à ce propos, le Professeur Yérim Diop de l’Université de Dakar, vice-président de l’Ordre des pharmaciens, a lié ce phénomène à la «progression constante du marché illicite des médicaments».
Malgré les dispositions légales prises par les autorités pour réglementer le marché de distribution des médicaments, les institutions de contrôle et de régulation, «il manque une volonté politique réelle pour régler le problème du marché parallèle», a déploré M. Diop. En effet, ce marché échappe au Laboratoire national de contrôle des médicaments chargé de veiller à l’application des normes, des conditions de conservation, de conformité et de procédures de fabrication des médicaments dans les officines et les laboratoires.
En plus, a ajouté le vice-président de l’Ordre des pharmaciens, les autres acteurs, chargés de veiller à l’application de la législation (police, gendarmerie et autres), ne sont pas «toujours informés des dispositions en matière de vente illicite de médicaments».
Pourtant, a-t-il indiqué, les médicaments les plus fréquemment contrefaits sont bien souvent les médicaments de base les plus essentiels : antibiotiques, analgésiques stéroïdes et les antihistaminiques, notamment les antipaludéens.
Les médicaments contrefaits sont définis par l’Organisation mondiale de la santé, comme des produits dont l’identité et la source sont délibérément falsifiées. Ils sont dilués, souvent mal étiquetés, expirés, sans principe actif et contiennent dans le pire des cas des substances mortelles.
D’une durée de deux jours, la conférence organisée par l’ambassade des Etats-Unis d’Amérique à Dakar, en coopération avec l’Organisation américaine des brevets et marques, a pour but «d’échanger les perspectives sur les défis et les politiques que les pays de la sous-région ont initié, pour lutter contre la vente et l’usage des médicaments contrefaits».
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