Conférences religieuses : le business du Ramadan

Au Sénégal, l’avènement du mois de ramadan est à l’origine de nombreux changements dans la vie sociale. Ainsi, en dehors de la métamorphose dans le comportement vestimentaire, le mode de vie, les conférences religieuses remplacent toutes les autres manifestations folkloriques.

Celles-ci faites par des prêcheurs qui souvent revisitent les pans de la vie du prophète Mouhamed (PSL) et les enseignements du Saint Coran visent à un retour vers l’orthodoxie musulmane. Cependant, des pratiques récurrentes semblent avoir pris le dessous sur cette quête du savoir religieux. Les conférences sont parrainées par de hautes personnes ou de gens aisés qui se présentent à la cérémonie le jour j avec de fortes sommes d’argent.

L’apparition de croissant lunaire marquant le début du mois de Ramadan au Sénégal est le moment d’organiser des conférences et autres rencontres visant à promouvoir les prescriptions de la religion. Malgré tout, des pratiques bannies par les enseignements du livre saint de l’Islam s’observent même après ces rencontres.

La causes d’un tel fait est selon les prêcheurs, nombreux sont ceux qui organisent des conférences rien que pour gagner de l’argent. «Le mieux est de changer les comportements mais, les conférences maintenant sont des fonds de commerce. Les parrains et les marraines sont souvent des ministres ou des personnes célèbres », déplore Oustaz Taib Socé.

Mieux juge-t-il, « la quête de l’argent ne doit pas prendre le dessus sur la religion. Les conférences doivent aboutir à un changement de comportement ». Cette quête de profit qui a poussé de nombreuses associations à se lancer dans l’organisation de conférences religieuses est aussi remarquée par le prêcheur de la radio Sud Fm.

Selon Oustaz Alioune Mbaye, les gens ne retiennent plus les enseignements lors des conférences car ils en profitent pour faire d’autres choses. « Les tirages des billets pour La Mecque sont organisés lors des conférences.

Elles sont aussi le moment de faire des parrainages ». Pis ajoute-t-il, « Il y’a certaines de ces rencontres dés la venue du parrain, le conférencier est interrompu dans son discours pour l’installation de l’invité d’honneur qui, une fois ses propos terminés, quitte l’assistance».

D’autre part, Oustaz Alioune Mbaye de poursuivre en s’offusquant contre l’accoutrement des femmes. «Souvent, les femmes qui assistent aux conférences sont coiffées avec de très longs greffages ce qui n’est aucunement en phase avec les enseignements du Prophète».

Pis, renchérit-il, « elles ne se voilent pas. Et ce sont celles dépigmentées qui occupent les premiers sièges». Toutes ces choses prouvent selon le prêcheur à la radio Sud Fm que « certains organisateurs ne sont aucunement intéressés par les enseignements à tirer des rencontres, mais plutôt par l’argent qu’ils y gagnent».

UN BUSINESS PROFITABLE AUX PRECHEURS
En ces temps, s’attacher les services d’un prêcheur est quasi impossible. Si ce n’est des téléphones qui sonnent dans le vide, ce sont d’autres personnes qui répondent à l’appel prétextant l’indisponibilité du concerné, ou simplement une réponse annonçant l’épuisement des dates.

«Les conférences sont réservées deux mois à l’avance. Tous les samedis et dimanches et d’autres jours sont aussi pris. Nombreux sont les prêcheurs qui ont donné toutes leurs dates», soutient Oustaz Taib Socé. Ce que confirme d’ailleurs Oustaz Alioune Mbaye qui confie : «il me reste aucune date. Même des lundis je les ai réservés».

Ces nombreuses sollicitations font que souvent le Ramadan est vu comme la période de traite des prêcheurs. Ce qui ne semble guère déranger certaines personnes interrogées.

«C’est tout à fait normal que les Oustaz reçoivent beaucoup d’argent pendant le Ramadan. Enseigner les prescriptions de la religion ne veut pas dire faire des conférences et rentrer les mains vides. Les prêcheurs sont des chefs de famille et ont des responsabilités à gérer. Au Sénégal, souvent, on pense qu’il n’est pas loisible de donner de millions à des prêcheurs.

Alors que des artistes reçoivent beaucoup plus d’argent lors de leurs prestations », soutient Oustaz Taib Socé. Poursuivant dans la même lancée, le prêcheur de la radio Sud Fm d’indiquer, « après le ramadan nombreux sont ceux qui parmi nous n’ont pas de conférences et ils tirent peu d’argent de leurs activités. Donc, s’ils parviennent à tirer profit du ramadan, ce n’est que bénéfique».

Toutefois, certains prêcheurs s’accordent à dire qu’ils ne fixent pas de tarif pour l’organisation d’une conférence. «Dispenser les enseignements de la religion n’a pas de prix. Parfois, après une conférence, il arrive qu’on se retrouve avec plus d’argent que le montant convenu pour faire la conférence», confient-ils.