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Les mouvements de rejet du fait migratoire prennent de plus en plus d'ampleur, comme en témoigne le succès des manifestations menées sous la bannière de Pegida en Allemagne, et la montée en puissance du parti UKIP au Royaume-Uni.
La crise socioéconomique qui a débuté en 2008 a exacerbé la crise morale et politique qui secouait déjà de nombreux pays européens. Elle a notamment accentué les interrogations des citoyens du vieux continent sur l’avenir de leur modèle social national en ces temps de croissance atone qui ont conduit la plupart des gouvernements à mettre en place des politiques d’austérité souvent douloureuses pour les populations. En perte de repères et effrayés par la possibilité d’un déclassement social, de plus en plus de citoyens se retournent contre les étrangers qu’ils accusent de profiter des aides sociales en refusant de s’intégrer quand ce n’est pas de menacer l’identité européenne.
Interrogés sur les raisons qui poussent les migrants à venir en Europe, 56% des Néerlandais et 54% des Français répondent « pour bénéficier des aides sociales » et 55% des Britanniques « pour avoir accès aux allocations sociales »[1]. Par ailleurs, six Européens sur dix (58%) estiment que l’immigration constitue un problème pour leur pays[2].
Au Nord, riches mais inquiets
L’Allemagne a connu ces dernières semaines plusieurs manifestations de citoyens rassemblés sous la bannière des Européens patriotes contre l’islamisation de l’Occident (Pegida) qui dénoncent une islamisation de leur pays et réclament un durcissement de la politique d’immigration et du droit d’asile ainsi que l’expulsion immédiate des candidats déboutés. Le mouvement est né en octobre dernier après la décision de la municipalité de Dresde d’ouvrir quatorze nouveaux foyers d’accueil pour les demandeurs d’asile avant la fin 2016. L’Allemagne est devenue en 2012 le premier pays d’immigration en Europe, Berlin a par ailleurs accueilli cette année un nombre record de demandeurs d’asile (100 000 au total, + 60% par rapport à 2013) et ses structures d’hébergement sont aujourd’hui saturées.
Les manifestants sont issus des classes défavorisées mais aussi de la classe moyenne, ils se vivent comme les laissés pour compte de la croissance allemande, se sentent ignorés des politiques et sont effrayés de voir leur pays devenir une terre d’immigration. Selon une enquête publiée par le quotidien Die Zeit au début du mois de décembre, la moitié des Allemands (49%) éprouvent de la sympathie pour le mouvement de protestation, un tiers (30%) déclarent le soutenir complètement. Par ailleurs, un autre sondage récent a révélé que 34% des Allemands estiment que la société allemande connaît une islamisation croissante.
Les manifestants de Pegida sont soutenus par l’Alternative pour l’Allemagne (AfD). L’Union chrétienne-démocrate (CDU) d’Angela Merkel est aujourd’hui débordée sur sa droite par cette nouvelle formation qui a récemment fait son entrée dans plusieurs parlements régionaux d’un pays jusqu’alors relativement épargné par le populisme.
Menace sur la liberté de circulation ?
Inquiet de la montée du Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP) qui attire de plus en plus d’électeurs, notamment conservateurs, et averti du fait que l’immigration est aujourd’hui, selon les sondages, la première préoccupation de ses compatriotes, le Premier Ministre britannique David Cameron (Cons) exige quant à lui un renforcement du contrôle aux frontières des Vingt-huit et une réforme européenne de l’immigration afin de réduire le nombre d’entrées dans l’Union. Le 28 novembre dernier, il a également proposé que les immigrés (y compris les citoyens européens) ne soient plus autorisés à bénéficier au Royaume-Uni de certaines prestations sociales ou encore d’un logement social avant quatre années de résidence dans le pays et indiqué que tout immigré souhaitant entrer au Royaume-Uni devrait justifier du fait qu’il possède une offre d’emploi.
Il n’est rien moins que certain que ces mesures, qui portent atteinte au droit des citoyens européens de circuler et travailler librement dans les 28 Etats membres, permettraient à David Cameron de maintenir l’UKIP à distance. Le dirigeant de la formation eurosceptique, Nigel Farage, a d’ailleurs qualifié les propositions du Premier Ministre de ridicules et n’a pas hésité à faire de la surenchère, indiquant – à juste titre – qu’elles étaient impossibles à mettre en place tant que le pays resterait membre de l’Union européenne. En septembre dernier, le leader de l’UKIP avait fort judicieusement choisi d’organiser le congrès de son parti à Doncaster, ville du dirigeant du Parti travailliste Ed Miliband, espérant ainsi attirer les électeurs travaillistes exaspérés par l’afflux des migrants.
Selon une récente enquête du German Marshall Fund, les trois quarts des Britanniques (73%) désapprouvent la façon dont leur gouvernement gère les questions d’immigration[3]. Par ailleurs, 40% des Européens interrogées dans ce sondage souhaitent que leur pays applique une politique d’immigration plus restrictive.
Enfin, le 11 novembre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a confirmé qu’un Etat pouvait légitimement exclure un citoyen européen séjournant sur son sol du bénéfice de certaines prestations sociales.
Les services sociaux de Leipzig avaient refusé à une citoyenne roumaine (qui n’avait jamais travaillé, ne recherchait pas d’emploi et ne parlait pas allemand) le versement de prestations sociales (allocations chômage et logement). Celle-ci avait porté plainte pour inégalité de traitement. La Cour a estimé que « tout Etat membre a la possibilité de refuser l’octroi de prestations sociales à des citoyens de l’Union européenne inactifs qui exercent leur liberté de circulation dans le seul but de bénéficier de l’aide sociale d’un autre Etat membre alors même qu’ils ne disposent pas de ressources suffisantes pour prétendre à un droit au séjour ».
Une Europe impuissante
Le nouveau président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, demande un renforcement de la solidarité entre les Etats membres et souhaite mettre en place une nouvelle politique migratoire qui faciliterait l’ouverture de voies d’accès légales au vieux continent. Il sait néanmoins que les pouvoirs dont dispose Bruxelles dans ce domaine sont limités, l’immigration demeurant une compétence des Etats nationaux, aujourd’hui très réticents (c’est un euphémisme) à tout nouveau transfert de souveraineté vers l’Union européenne.
A l’heure où Barack Obama s’apprête à régulariser environ cinq millions de migrants[4], la volonté politique sur la question pourtant si européenne des migrations, fait cruellement défaut de ce côté-ci de l’Atlantique.
Effrayés par la percée de mouvements populistes qui séduisent de plus en plus d’électeurs, les politiques n’assument pas le discours favorable à l’immigration. Ils savent pourtant que l’Europe est vieillissante et que le renouvellement des populations et la survie des systèmes sociaux ne peuvent être garantis sans immigration.
Les incidents et les manifestations contre les populations immigrés se multiplient et le vote en faveur des extrêmes est en hausse dans tous les Etats membres. Les politiques déplorent et condamnent ces phénomènes sans trouver les moyens de l’endiguer.
L’exemple suédois
Début décembre, les Démocrates suédois (SD) ont fait chuter le gouvernement social-démocrate en s’alliant à l’opposition de droite lors du vote du budget.
Les populistes exigent une réduction de 85% de l’immigration de façon à investir les sommes économisées par cette mesure dans les secteurs de l’emploi, de la santé et des aides sociales. Jimmie Akesson, le dirigeant des Démocrates suédois, aime à lier immigration et croissance du coût de l’Etat-providence. Pour lui, l’islamisme constitue « le nazisme et le communisme de notre temps ». 44% des Suédois pensent que leur pays compte aujourd’hui trop d’immigrés (ils étaient 37% l’année passée). « Les gens ne sont pas forcément moins tolérants mais ils regardent la télévision et se disent que limiter ou supprimer l’immigration est le meilleur moyen de régler certains problèmes » souligne Anders Hellström, chercheur en science politique de l’université de Malmö.
Selon l’enquête du German Marshall Fund, les deux tiers des Suédois (65%) estiment également que les immigrés s’intègrent mal dans la société[5]. S’ils arrivent principalement par le Sud, ces derniers aspirent en effet à se rendre dans les pays du Nord du continent qui jouissent d’une meilleure santé économique. Les trois quarts des réfugiés (75%) arrivant dans l’Union européenne sont ainsi accueillis par cinq Etats membres : l’Allemagne, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et la Suède.
Le Premier ministre Stefan Löfven avait d’abord choisi de convoquer des législatives anticipées qui n’auraient sans doute pas changé grand chose au rapport de force actuel et que les Démocrates suédois auraient transformées en référendum sur l’immigration. Devant ce risque, les sept partis de gouvernement que compte la République scandinave ont décidé de s’unir pour assurer la stabilité du pays et permettre au gouvernement de continuer son travail. Signé le 26 décembre, l’accord s’inscrit dans le long terme puisqu’il s’étend sur les deux prochaines législatures, soit jusqu’en 2022. Il permet de mettre – provisoirement – un terme à la capacité de nuisance des Démocrates suédois qui avaient promis de rendre le pays ingouvernable.
[1] Transatlantic Trends: Mobility, Migration and Integration.
[2] Ib.
[3] Ib.
[4] Sont concernés les clandestins présents aux Etats-Unis depuis plus de cinq ans ; ceux qui ont des enfants disposant de la citoyenneté américaine ou du statut de résident permanent et ceux qui se seront fait enregistrer par l’administration sous réserve de s’être soumis à une vérification de leur passé judiciaire et de payer leurs impôts.
[5] Transatlantic Trends: Mobility, Migration and Integration.
14 Commentaires
Waarou
En Janvier, 2015 (02:50 AM)Une petite minorite, les adeptes du Wahabisme, a capturé une belle religion, l'Islam. Les consequences seront enormes
Maiga Montreal
En Janvier, 2015 (04:00 AM)They are suffocating to compete they need to cut back on their social programs .those programs used to be the safety net for the less fortunate class of the society and immigrant .those immigrant usually benefit from the programs because most of them dealing with language barrier and low level of education and skills.history have teach us that every time the less educated are stranded their target are the immigrants and the governments it s the result of xenophobia and islamophabia .i hate France I don t see how they become a world power if it was sucking our blood like a vampire
Blackmusulman
En Janvier, 2015 (04:13 AM)@warouet Ndiagamarbi
En Janvier, 2015 (09:28 AM)Conscient
En Janvier, 2015 (10:32 AM)Pourtant, ces crises sont dûes eu fait d une mauivaise politique, l´échec d un modéle capiutaliste qui ne vise qu´á enrichir davantage les plus riches en appauvrissant encore les plus pauvres...
La crise qui frappe lces pays occidentaux , c est la faute de leur gouvernants recpectifs... Il faut changer de méthode: penser au peuple et non á leur propre parti, á leur poche....
On ne le dit pas souvent, mais la réalité est que les pays européens sont les plus corrompus de la planéte, mais meme leur peuple ne le sait pas: Par exemple, en France, tous les Chefs Etat de Giscart jusqu´á Sarkozi sont impliqués ont été traduits en justice aprés leur Mandat....totalement impliqués dans de scandales Financiers, aisni que leurs collaborateurs... C e sont les pays oú les retrouve le plus d´évasion fscal dans le monde..
Ce qui est étonnant, c est que le peuple européen en général est trop bête et ignorant pour comprendre certaines choses. Ils sont toujours maliables et corvéables á souhait par leurs hommes politiques qui abusent de leur confiance.....Maintenant quand il arrivent la crise, le pueple bête, écervelé et ignorant accuse les étrangers, alors que ils doivent leurs proprob^´emes á leurs gouvernants et non aux étrangers qui, sans eux, l´Europe ne serait jamais construit......
Alphaone
En Janvier, 2015 (10:40 AM)Certains quartiers de Bruxelles, sont devenu pratiquement interdit au non musulmans, même les forces de l'ordre n'interviennent plus de peur d'être caillassé.
Il est impossible de trouver une boucherie qui n'est pas hallal, par contre il y à de véritables super-marchés de la drogue, les agressions sont banalisées.
Alors ne soyez pas étonné d'avoir un sentiment de rejet, de la part des populations autochtones.
Des jeunes, se convertissent, même par internet et partent faire votre guerre sainte en Syrie et en Irak, et ne venez pas dire que ceux là ne sont pas musulmans.
Il viendra bien un moment ou nous utiliseront les même méthodes que celles utilisées par l'EI.
Et croyez moi, cela n'a rien à voir avec la couleur de peau.
Quand a cette phrase, "l'Europe sera tôt ou tard islamise par la force", c'est la preuve de ce que j’écris plus haut, il n'y à pas de place pour votre haine obscurantiste, dans les pays civilisés.
Oui Mais
En Janvier, 2015 (11:03 AM)"les Pays Civilisés"
En Janvier, 2015 (11:12 AM)et detruisent toutes institutions, tuenet les gens et prennent leurs richesse avec une haine degeulasse. Quand vous observez bien. Les emmigres qu'ils critiquent, c'est a ses gens la qu'ils ont detruit leur pays.
Il faut assummer vous les blancs. Laissez les gens vivre en paix personne ne vous derangera dans votre soit disant civilisation.
peace
Pays Civilisés
En Janvier, 2015 (11:56 AM)Farida
En Janvier, 2015 (13:52 PM)Preparé Vous A Rentré
En Janvier, 2015 (14:00 PM)Dambaleforce
En Janvier, 2015 (16:59 PM)Wsfgrfjh
En Janvier, 2015 (19:55 PM)Deutschsand
En Janvier, 2015 (11:05 AM)Au lieu d’analyser le message des manifestants, les politiques allemands, comme certains intervenants préfèrent s’acharner sur les protestataires de PEGIDA, en les qualifiant de racistes.
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