Envoyée spéciale - Les Sénégalais devront prendre leur mal en patience avant de voir un de leurs compatriotes à la tête de la Boad. Amadou Kane, actuel directeur de la Bicis et candidat du Président Abdoulaye Wade, a donc bien fait de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Hier, à Niamey, le Bénin n’a rien voulu entendre, soutenant que le poste lui revenait de «droit». Abdoulaye Wade a eu beau défendre le dossier, mais il s’est retrouvé esseulé. Sans soutien, il a plié et attend peut-être de rompre au prochain sommet extraordinaire qui sera convoqué à ce sujet.
La 10e conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) s’est terminé en queue de poisson. Les participants n’ont pu accorder leurs violons sur les nominations d’un nouveau président à la Banque ouest-africaine de développement (Boad) et d’un gouverneur à la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao). C’est d’ailleurs ce qui explique que le communiqué final précise que ces postes seront pourvus à l’issue d’un sommet extraordinaire qui sera convoqué ultérieurement. Ainsi, ce qui était parti pour être une journée paisible, avec des décisions qui devaient passer comme lettre à la poste, allait se révéler une journée marathon pour les chefs d’Etat. Avec deux séances à huis clos à la clé.
La deuxième séance, qui concernait les nominations à la tête de la Boad et de la Bceao, a finalement débuté à 17 heures 30. A ce rendez-vous, n’assistaient que les chefs d’Etat et de gouvernement. C’est le Président Abdoulaye Wade qui, le premier, va donner des indices sur l’ambiance de ce huis clos. En effet, il va s’extirper de la salle pour demander à sa délégation de lui trouver les statuts de la Boad. Quand on sait que le Sénégal a comme candidat à la succession de Yayi Boni, ancien président de cette institution, l’actuel Directeur de la Bicis, Amadou Kane, on mesure mieux le geste de Abdoulaye Wade. La confirmation viendra d’ailleurs un peu plus tard. Car des confidences de personnes ayant pris part à la réunion, le Président du Bénin, Mathieu Kérékou, n’a pas voulu lâcher du lest. Arguant le fait que son pays n’est à la tête d’aucune institution sous-régionale. Yayi Boni, l’ancien président étant béninois, il appartenait donc à son pays d’assurer la continuité.
Mathieu Kérékou a, selon certains témoignages, reçu le soutien de la quasi-totalité des chefs d’Etat présents à cette séance. Ayant brandi le principe de rotation, Abdoulaye Wade, qui a tenu à rappeler ce qui s’est passé avec le Commissariat de l’Uemoa, où le Sénégalais Moussa Touré a laissé la place au Malien Soumaïla Cissé, s’est vu rappeler par ses pairs, ses déclarations lors du sommet extraordinaire tenu au mois de décembre dernier, toujours à Niamey. A cette réunion, Abdoulaye Wade avait soutenu et obtenu que le consensus soit privilégié dans les décisions à prendre et les choix à faire. Et dans le cas précis, «c’est presque la quasi-totalité des chefs d’Etat qui lui avaient tourné le dos». Mais c’était sans compter avec la détermination du successeur de Abdou Diouf à la tête du Sénégal. «Il est même allé jusqu’à rappeler à tous ceux qui étaient présents, comment lui a été élu. De manière démocratique et transparente». Ce qui laisse supposer que ce n’est pas le cas pour bon nombre de ses pairs. Et lors de sa troisième sortie de la salle, c’est un Abdoulaye Wade qui semblait sur les nerfs qui a été aussitôt rejoint par le Premier ministre ivoirien Charles Konan Banny. Dans un petit salon, Charles Konan Banny a parlé au «grand frère» Wade pendant une bonne dizaine de minutes. Avant qu’ils ne regagnent ensemble la salle de réunion.
A 20 heures 20, Me Wade en a eu assez. A ce moment, la décision du sommet extraordinaire avait-elle été prise ? En tout cas, il va sortir de la salle, pour regagner sa voiture. Direction l’aéroport. Les Sénégalais qui l’attendaient pour être reçus en resteront baba.
Finalement, cette sortie allait ressembler à une bouderie. Car ce n’est que 35 minutes plus tard que les chefs d’Etat allaient sortir de la salle de réunion. Avec un communiqué final, très diplomatique, ponctuant le tout. Cependant d’autres informations précisent que Abdoulaye Wade a pris le soin de présenter ses excuses à ses pairs avant de se retirer. Argument principal : il devait faire la plus longue durée de vol pour rentrer. Et ces mêmes interlocuteurs soutiennent qu’il a eu le temps d’approuver les grandes lignes du communiqué final avant de se retirer.
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